
Vous avez dit « le Faget d'Oloron ! » et vous êtes bien sûr que ça existe ?
Si, ayant un peu perdu votre nord, et que votre GPS ne fonctionne pas ,vous vous informez de la route à prendre auprès du premier oloronais venu, le seul renseignement qu'il sera capable de vous donner,c'est qu'il a déjà entendu ce nom. Encore heureux que, si croyant savoir il ne vous envoie pas au Bager, c'est à dire aux antipodes de ce que vous cherchez.
Mais oui , le Faget existe et depuis la nuit des temps s'il vous plaît.
Le nom de ce hameau d'Oloron trouve ses racines latines dans le mot "fagus", qui évoque le hêtre, le "fayard" comme disent certains. Ce bel arbre abonde dans ce pays de collines et de forêts. En béarnais, le nom devient "eth Hayet d'Aülourou" et sonne dans nos chœurs d'une façon on ne peut plus musicale.
Petit voyage dans le temps. Nous sommes un dimanche d'août 1966, Une petite fête tout près d'Oloron. La colline est noire de monde, en face, en pleine lumière, dix hommes du Faget font retentir la nuit de leurs voix. Le chant est beau, sans prétentions, très puissant, parfaitement accordé au cadre champêtre de l'endroit.
La clef de voûte de l'ensemble, c'est Julien(Julien Cabanius)il est le plus ancien de nous tous, il est aussi le chantre du village, il connaît toutes les chansons de l'époque. Despourrins, Hatoulet, Navarrot, Darrichon et bien d'autres n'ont pas de secrets pour lui. C'est lui qui a inoculé à tous les petits jeunes du patelin le goût du chant.
Ce soir là, nous sommes passés sans transition, de l'auberge de Marie-Jeanne à la scène.
Le temps a passé, et après une période de rodage à écumer les fêtes alentours, les commentaires élogieux, sont venus conforter notre façon de faire. Le tout premier, venant de Monsieur René Hégoburu, orfèvre en la matière s'il en est, qui disait dans la République après un festival de Siros ;«Sur le plan du spectacle, la prestation du Faget valait à elle seule le déplacement...»
La municipalité d'Oloron, s'est intéressée à nous, nous offrant les "hardes " noires et rouges qui nous servent toujours de cache-misère et de costume de scène. C'est nous qui les avons voulues ainsi.
Entre les années 1970 et 1975, nous avons fait à cinq reprises des apparitions sur les chaînes nationales de la télévision, invités par Jacques Chancel et Armand Jammot.
Une invitation de voyage aux États Unis dut même être refusée ; les paysans du groupe ne voulant en aucun cas s'éloigner de leurs bases. Le scrutin à bulletins secrets qui confirma le "non" fut sûrement très influencé par les épouses des chanteurs qui elles, n'étaient pas invitées.
Notre répertoire a évolué dans le temps. Bien sûr, nous chantons toujours les classiques béarnais, que nous alternons avec des chants français par respect du public, en puisant dans le magnifique répertoire montagnard d'Alfred Roland.
Nous animons aussi toutes sortes d'offices religieux. Puisque chanter c'est prier au pluriel, nous espérons bien que le purgatoire de notre public est tout de même assez agréable, car dès que nous entonnons, nous autres sommes au paradis.
Il est bien loin, le soir de notre première sortie, le temps a passé. Les anciens s'en sont allés, des jeunes sont venus. Notre façon favorite de chanter est restée toujours la même, en plein air, sous les étoiles et à capela.
Des créations récentes sont venues enrichir notre programme mais toujours c'est la forêt éternelle dont notre village porte si bien le nom, Le Faget «eth Hayet » qui garde nos faveurs.
Nous chantons aussi, la fierté des pics Pyrénéens, le bleu des lacs, les yeux des filles, la vie pastorale, les couleurs de l'arc-en-ciel, le ruisseau qui chante faisant semailles de paix et d'amour, la maison de Thérèse et bien d'autres encore.
Tout cela comme il se doit, dit et chanté en pur béarnais campagnard.
Car sûrement aujourd'hui plus que jamais, le Faget a besoin de chansons.
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